Dernière Nav aux Antilles : la Boucle est bouclée !

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Malendure – Le Marin 28 et 29 avril 2020

Hier soir, nos bateaux copains du confinement sont venus nous dire au revoir car nous partons demain à l’aube pour rallier en Martinique, le Port du Marin, où nous devons charger Boomerang sur cargo. Petits échanges d’annexes à Boomerang…bouffées d’émotions garanties.

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Dernier plat de ouassous (crevettes d’eau douces antillaises), marinées et grillées. Petit film pour les enfants, et flash-back de ces derniers mois écoulés pour les parents. 

Nous sommes tiraillés entre la satisfaction de pouvoir rentrer en France, et l’envie de rester ici. Il y a encore tant de choses à faire, à découvrir… Alea jacta est ! Comme dit Ced (Pégasus), « une porte se ferme, mais d’autres vont s’ouvrir ».

Boomerang rentre en cargo, nous en avion : c’est notre traversée à nous. Un choix murement réfléchi ces dernières semaines. Un choix « contraint » que nous acceptons de financer (grevant notre budget voyage il s’entend), parce que c’est celui de la sécurité des hommes et du bateau. 

Beaucoup n’ont pas cette option. Pour eux pas d’autre choix que la Transat, la vraie. Si certains, l’avait envisagée, d’autres non. Pour la plupart, le COVID 19, aura considérablement modifié leur retour. Quid d’un retour avec enfants à bord ? Evanoui, l’équipier sensé compléter l’équipage. Quid de la préparation technique du bateau ? Quid du Covid au milieu de la traversée ? Quid de l’avitaillement ?…Une traversée longue de près de 3000 miles – une 30aine de jours, dans des conditions souvent éprouvantes (une semaine de près très inconfortable, une semaine au moteur dans la pétole, le reste au portant si tout va bien) qui rebute souvent tout ou partie des équipages. La version 2020 sera « assaisonnée » au corona virus, avec tous les ingrédients du confinement et ses complications… 

Alors chacun s’organise comme il peut, avec les moyens du bord. L’entraide bat son plein dans les mouillages, les intérêts se mutualisent, les liens se soudent. la communauté des gens de la mer redouble d’ingéniosité pour trouver les solutions les meilleures… 

Chapeau bas à tous ces équipages qui s’arment de courage pour relever ce défi !!!

On se couche tard. On décide de reporter notre départ de quelques heures…Le motif officiel : « Rallier le Marin en une traite (130 miles – 20 heures de nav) pour passer de jour le rocher du Diamant et éviter les casiers de Sainte Anne ».  La raison officieuse : ne pas partir de nuit comme des voleurs et pouvoir faire un dernier coucou aux tortues…

10:00, Top départ pour notre dernière nav. Nous passons à hauteur de Takum4, Pégasus, Spika, tous sur le pont pour nous saluer. Les cornes de brume sont de sortie, séquence émotions. Un mile plus loin, toute voile dehors, la VHF crépite : c’est Flyer II, qui nous souhaite « bon vent ».

Il fait beau, pas d’alizé, mais un thermique d’Ouest, pas de houle, nous filons à 6 nœuds.

Au loin, au niveau de Basse Terre, un grain se profile. Le porte hélicoptère Dixmude remonte la côte en direction de Déhaie. 

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On est à 9 nœuds apparents, toutes voiles dehors, quand le grain nous gratifie de quelques gouttes. L’anémomètre (instrument de mesure du vent) s’envole alors en flèche : 20 nœuds et continue de monter…on rentre le génois et lofons (remonter vers le lit du vent – moins de prise au vent), histoire de le laisser passer sans devoir prendre un ris, on sait que ça ne va pas durer…Pourtant le grain s’éternise, les rafales s’intensifient, l’anémomètre affiche 32 nœuds…la grand-voile claque, c’est pas le moment de casser du matos !  On prend un ris sous les regards des matelots du Dixmude qui croise à 2 miles sur notre tribord. Puis le grain passe comme il était venu !

5 semaines de confinement, c’est 5 semaines sans naviguer. Cette petite mise en jambe, aura remis les pendules à l’heure ! Avec Steph, on réalise que plus le temps passe, plus les réflexes reviennent vites. C’est plutôt sympa de voir le chemin parcouru depuis notre départ. 

On s’interroge sur nos navigations futures dans le Golfe. La navigation de voyage, n’a rien à voir avec une sortie bateau. Ici, Boomerang, c’est notre maison, notre moyen de locomotion. Rien à voir avec la recherche de performance. Ménage ta monture pour aller loin. C’est pourquoi nous naviguons en mode sous toilés la plupart du temps. Nous n’avons que très peu utilisé nos voiles d’avant : hormis les spis, le ginnaker, deux ou trois fois, nous n’avons pas eu l’occasion de sortir notre code zéro. Superflus en mode voyage, nous attendons avec impatience de les éprouver en Bretagne terrain de jeu propice par excellence. Quand on va rentrer notre référentiel navigation aura bien évolué. Nous connaissons maintenant bien Boomerang (avec lequel nous avions que très peu navigué avant notre départ). Du coup, de belles nav en perspective !

Nous traversons le passage des Saintes, et embouquons le chenal de Dominique avec 1 ris et génois plein, 25noeuds de vent apparent établi, une houle clémente et filons à 8/9 nœuds. Les enfants s’occupent : Camille se maquille et gère la cambuse, Charles joue.

Sous le vent de la Dominique, c’est pétole et cagnard. On en profite pour farnienter, bercés par les moteurs. Pas de bateau à croiser (cf.interdiction de naviguer), ça fait bizarre. Nous avons déclaré notre traversée au CROSSAG (Cross Antigues/Guyanne). On imagine que les coastgards dominicains, ont été prévenus, ils ne nous donnerons aucun signe de vie. 

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A 17 heures, à encore 18 miles du canal de Martinique, le vent vient nous sortir de notre léthargie. Un bon coup de boost vivifiant (les embruns nous rafraichissent), avec des vagues courtes…Un beau coucher de soleil. 

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Une traversée du canal de nuit, plutôt sympa, sous grand-voile et 1 ris, avec 1/2 génois, pour des vents entre 25 et 30 nœuds (apparents), et 8/9 nœuds en moyenne.

Toujours en vigilance, et peu saoulés par le vent qui siffle en continue dans les oreilles, nous décidons de faire un pitstop pour la nuit à Saint Pierre. Nous y mouillons à 1 heure 30 du mat après 2 heures de moteur le vent dans le nez et les yeux fatigués à force de scruter les eaux qui filent devant nos étraves : pas envie de finir à l’eau avec un casier dans les hélices. 

Petit réveil sur cette baie de Saint Pierre, où nous avions passé un si bon moment . Avec le jour, les souvenirs refluent. Les enfants, se souviennent du Vaval brûlé sur la plage, des rues grouillantes de monde en ces temps de carnaval, des farineurs (lanceurs de farine), de l’histoire terrible de cette ville anéantie par l’éruption du Mont Pelé, que nous avons gravi…

Alors que nous quittons Saint Pierre, la marine nationale nous rejoint. Ils souhaitent juste savoir si tout va bien et où nous allons. Tout va bien il est 9:00, et il nous reste 30 miles à parcourir pour rallier Sainte Anne.

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La traversée de la Baie de Fort de France est musclée, les vents sont très variables, oscillants entre 23 et 30 nœuds en rafales, la vigilance est de mise car nous remontons au près serré (38°) pour ne pas trop s’éloigner des côtes. 

Arrivés à hauteur des Ances d’Arlets le vent tourne. On le prend en pleine face : moteurs à fond contre les vents, c’est 3 nœuds de vitesse. On n’est pas au bout de nos peines. Le capitaine se laisse aller. Je savoure le paysage.

Le rocher du Diamant, le « HMS Diamond Rock », nous envoûte encore une fois par ses falaises abruptes, forteresse naturelle, théâtre de combats navals historiques entre Français et Anglais

Au loin, une forêt de mâts se dessine. Sainte Anne et le Marin, avec leurs quelques 400 bateaux confinés, c’est surréaliste. 

st anne

Après 6 heures de galère, « c’est pas de la navigation ça ! », nous mouillons dans l’Anse de Caritan, à côté de Kentan 2. Ici aussi, plein de copains bateau, Rivendel, Wotan, L’Alchimist, Aelig, Pikou Panez Tuvaou etc ; aurons-nous le temps et la possibilité de les revoir ?

One Reply to “Dernière Nav aux Antilles : la Boucle est bouclée !”

  1. Vous repartez le cœur plein de souvenirs et d émotions avec les bateaux copains . Une belle aventure familiale, de belles rencontres amicales , des découvertes de sites et de communautés . Plein de belles choses , ne soyez pas tristes , vous repartirez , dans la négative c est qu’une nouvelle aventure pointera le bout de son nez en bzh . Que du positif vous attends c’est certain . Bizh vero

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