Assurance, Expertise contradictoire et RIPAM… Quesako !

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Mes chèr-e-s ami-e-s 😘

Je ne pensais pas, un jour, m’essayer à décrire les rêgles du Ripam, et à vous expliquer comment se passe une expertise contradictoire dans le domaine maritime et les relations qui en découlent avec votre assureur.

Autant vous dire que cela se passe relativement bien mais cela peut prendre du temps ! 😉

Je ne devrais pas non plus aborder ce sujet dans le cadre de la revente future et pour l’instant improbable de mon catamaran. Pour ceux qui connaissent mes talents peu bricoleurs, de mon imagination peu débordante, et de mon souci absolument pas réel de l’optimisation de mes projets, arrêtez vous à ces quelques lignes et ne soyez à jamais acquéreur de mon second bébé.

Nous avons donc été victime collatérale d’un abordage le 24 Juillet 2020 en baie de Quiberon, après avoir effectué pas moins que 6200 miles en voyage.

Triste réalité  ! Qu’importe les responsabilités engagées, comme souvent en matière d’automobile, elles sont principalement partagées aussi en nautisme .

Ces expertises d’assurance automobile, que je connaissais très bien, dans le cadre de mon ancien métier et celles plus particulières dans le domaine de la santé suite à mon accident de la vie en 2009, s’additionnent à cette nouvelle expérience maritime que nous avons vécu cet été, et qui est la première expérience de sinistre nautique depuis le début de notre pratique de la croisière habitable en 2010 et plus 12 000 miles parcourus. 😉

Comme toute expérience est bonne à prendre, je me vais de ce pas, vous conter notre aventure, les rapports d’expertise, les discussions avec les experts et la négociation avec l’assurance.

Tout d’abord, toute notion d’abordage entraine de facto, la confrontation de deux bateaux et de deux capitaines. Passé le moment de l’abordage, et de se taper sur la gueule ou pas, il est important de contacter son assurance bien évidemment, rapidement et de rédiger un rapport de mer.

Ce rapport de mer détaillé doit expliquer, la situation du bateau avant, pendant puis après l’accident : cap, vitesse, heure, lieu, état de la mer et du vent, membres d’équipage etc. Il doit aussi mentionner les dégats physiques, matériels ou les pertes subies observées visuellement, et laisser des réserves sur ce que vous n’avez pas pu voir, déceler ou détecter.

Ce rapport de mer est envoyé à l’assurance qui nomme alors un expert représentant votre partie. L’assurance adverse nomme aussi un autre expert pour son client.

Nous rentrons alors dans la phase de l’expertise contradictoire, où les experts doivent d’abord déterminer la part de responsabilité de chaque chef de bord. Cette part de responsabilité est déterminée en affectant à chacun les règles non respectées du RIPAM.

Mais qu’est-ce donc ce RIPAM ?

Le Règlement international pour prévenir les abordages en mer (RIPAM), aussi appelé ColReg ou ColReg 72 de son nom anglais Collision Regulations 1972, est un des règlements de l’organisation maritime internationale. La traduction française officielle est l’ouvrage 2 du SHOM (service hydrographique et océanographique de la marine). Ce document publié début 2016 combine et remplace les précédents ouvrages 2A (texte) et 2B (planches).

Son but est de fixer des règles de « priorité ou de privilège» entre les navires. Ces règles se basent sur la direction relative des navires, sur leur capacité de manœuvre et sur leur moyens de propulsion. Le règlement normalise aussi les feux et différentes marques qu’arborent les navires.

Idée générale

Chaque mot utilisé dans ce règlement a son importance, ainsi par exemple, on ne parle pas de navire « prioritaire », mais de navire « privilégié », ce dernier possède la « priorité » au sens large du terme, de conserver sa route et sa vitesse, néanmoins, ce navire privilégié peut manœuvrer dans certains cas. Il s’agit d’une obligation qui est à mettre en parallèle de celle de l’autre navire qui est l’obligation de s’écarter et de laisser la place à son vis à vis avec lequel le risque de collision est avéré . Dans certaines situations il peut ne pas y avoir de navire privilégié, par exemple deux navires à propulsion mécanique faisant des routes directement opposées, les deux navires doivent manœuvrer sur leur tribord. D’autres situations peuvent inclure plus de deux navires, et devenir rapidement compliquées, la réduction de vitesse permet alors de prendre plus de temps pour analyser la situation (règle 8.e) Le but est bien de prévenir (éviter) les abordages (collisions) en mer. En dernier recours le navire dit « privilégié » a le devoir d’éviter la collision par tous les moyens qui lui sont possibles, si le navire « non privilégié » n’applique pas les règles (règle 17.b)

Les règles du RIPAM s’appliquent à tous les navires en haute mer et dans les eaux attenantes accessibles aux navires de mer (règle 1.a).

Partie B – Règles de barre et de routes (Règles 4 à 19)

  • Section I – Conduite des navires dans toutes les conditions de visibilité.(Règles 5 à 10)
    • Règle 5 : Obligation de veille permanente.
    • Règle 6 : Vitesse de sécurité adaptée aux conditions existantes.
    • Règle 7 : Détermination du risque d’abordage.
    • Règle 8 : Manœuvre pour éviter les abordages.
    • Règle 9 : Navigation dans les chenaux étroits.
    • Règle 10 : Navigation dans les dispositifs de séparation du trafic.
  • Section II – Conduite des navires en vue les uns des autres (Règles 12 à 18)
    • Règle 12 : Les navires à voile.
    • Règle 13 : Définition du navire rattrapant.
    • Règle 14 : Navires faisant des routes directement opposées.
    • Règle 15 : Navires dont les routes se croisent.
    • Règle 16 : Manœuvre du navire non privilégié.
    • Règle 17 : Manœuvre du navire privilégié.
    • Règle 18 : Responsabilités réciproques des navires.
  • Section III – Conduite des navires par visibilité réduite (Règle 19)

Dans ma situation et malgré ma position de navire non privilégié, la responsabilité est partagée entre nous et l’autre bateau. Ceci montre bien, que dans tout abordage, la responsabilité est toujours partagée, certaines règles ayant un peu plus d’importance que d’autres mais globalement les règles 5 et 8 sont systématiquement reprochées aux deux navires rentrés en collision .

Une fois les responsabilités définies, les experts listent les dommages subis sur chaque bateau, définissent les méthodologies de réparation et chiffrent le coût de la remise en état.

Leur dernière mission est de définir le Quantum pour chaque bateau, c’est à dire la somme allouée aux réparations, déduite de la vétusté et des franchises parfois variables suivant le pourcentage de responsabilité et la typologie de l’accident.

Sans rentrer dans le détail de notre cas personnel, il est évident qu’il faut toujours se battre, car les solutions proposées peuvent parfois ne pas être viables.

En ce qui nous concerne, les experts souhaitaient faire réparer la poutre, ce qui ne correspondait pas à notre choix. Tout composite est réparable, néanmoins les points durs liés à  la réparation de la poutre, ne m’apportaient pas une sérénité à toute épreuve pour la suite de l’aventure.

En conséquence, nous avons donc choisi de remplacer la poutre endommagée par une poutre neuve, et là les esprits s’échauffent car bien évidemment la différence entre la réparation de la poutre et la fabrication d’une nouvelle, m’expose à un delta financier non négligeable et à ma charge bien évidemment.

Ayant déjà assemblé le même type de catamaran avec Boomerang 1 (Rackam 32 plan Erik Lerouge), nous avons donc décidé de prendre en charge, l’intégralité du chantier. Nous avons donc négocié avec notre assureur pour qu’il nous verse le quantum défini en prenant aussi à notre charge, potentiellement les découvertes éventuelles à venir pendant les réparations.

Ce chantier est suivi par Erik Lerouge en personne, que nous respectons bien évidemment pour la qualité de ses plans mais aussi par la reconnaissance qu’il a de notre travail besogneux. 😉

 

 

Si vous estimez avoir les compétences, le temps et certains contacts amis professionnels, cette solution est possible dans tous sinistres entre bateaux et vous permet aussi d’éviter d’une certaine manière de perdre intégralement votre franchise parfois conséquente.(10 000 euros dans notre cas pour un refus de priorité)

Nous nous attaquons donc à ce nouveau chantier éphémère et remercions au passage notre assureur Transmer, pour la qualité de notre relation, sa capacité d’analyse, sa compréhension de notre situation et le règlement de notre sinistre dans les meilleurs délais.

Contre l’avis des experts, nous ne réparerons pas la poutre. Cette réparation nous semble être une option peu acceptable (surpoids, modification structurelle, esthétisme…

A partir des plans fournis par Erick Lerouge, nous avons lancé la fabrication d’une poutre neuve infusée en carbone par un professionnel. Option plus couteuse mais qui offre le double avantage d’une résistance supérieure et d’un gain de poids non négligeable à l’avant.

De notre côté, nous profitons de ce délais imposé de travaux pour poursuivre avec Geneviève, l’optimisation de Boomerang 2. Nous vous en dirons plus avec photos à l’appui dans un prochain article.  Optimiser pour mieux repartir ? Inch Allah…👍

Nous ne manquerons pas, bien évidemment, de vous tenir au courant de cette réparation et remise en état hivernale, débutée avec retard, fin Janvier 2021, pour une période estimée de 3 mois.

Kenavo !

Crédit photo Cécile Hoynant

4 Replies to “Assurance, Expertise contradictoire et RIPAM… Quesako !”

  1. Voilà une description très intéressante et enrichissante de votre expérience. Bon courage pour les réparations et pour les autres travaux.
    J’en retire que comme toujours, avoir de bonnes relations avec son assureur, est une aide précieuse pour la sérénité des discussions / négociations.

Répondre à Gilles HemeryAnnuler la réponse.

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